Gilles Caron était un grand photographe-reporter dans les années 60, l’Hôtel Fontfreyde expose 150 images et documents d’archives du 9 octobre 2015 au 9 janvier 2016.
Une exposition particulièrement marquante, cet article est rédigé dans un contexte particulier au vu des événements récents…
Les attentats à Paris ont eu lieu il y a quelques jours seulement. Je suis encore abasourdie par ce qu’il vient de se passer. Je ne souhaitais pas en parler ici, pourtant je ne peux pas vous parler de cette exposition sans parler de ces attaques.
Nous avons tous été touchés. Le souffle court nous avons tous attendu les nouvelles. Les mauvaises nouvelles. Nous avons été et sommes toujours submergés d’informations, télé, radio, internet et surtout réseaux sociaux. Des infos pas toujours vérifiés. Nous avons tous vu des images terribles. Ces images prises par des journalistes ou par des badauds. A quoi servent-elles ? Sont-elles vraiment utiles ? Pour prendre conscience de l’horreur faut-il vraiment avoir les images sous les yeux ?
Il y a certaines images que j’aurais préféré ne jamais voir…
Tout le monde s’est déjà demandé « Pourquoi ces personnes sont-elles en train de filmer ou de photographier ? », « Pourquoi ne vont-ils pas aider les blessés au lieu de braquer leurs téléphones/appareils photos/caméras ? ». Où est la limite ? Peut-on tout montrer sous prétexte d’informer ?
Je n’ai pas de réponses à toutes ces questions.
Ces images terribles créer un malaise, elles soulèvent beaucoup de questions sur le rôle des médias et sur la frontière entre information et voyeurisme.
Des gens vivent tous les jours ce que nous avons vécu vendredi soir. Les attentats sont leur quotidien. Ils vivent la peur au ventre.
Gilles Caron avait lui décidé d’en faire son quotidien. Il a vu des choses terribles, il a souhaité informer et dénoncer ce qu’il se passait pendant les guerres. Lui-même s’est posé toutes ces questions. Il s’est interroger sur son rôle de journaliste, sur son rôle de « témoin ». Cette exposition présente le travail du photographe-reporter. Certaines photographies de Gilles Caron sont violentes. Un avertissement est d’ailleurs émis à l’entrée de certaines salles. Je ne peux que vous conseiller d’aller voir son travail, même si vous n’entrez pas dans les salles aux images chocs.
Gilles Caron
Il a choisi de se lancer dans le photojournalisme lorsqu’il était soldat. Il était alors parachutiste pendant la guerre d’Algérie. En se retrouvant au cœur d’une guerre asymétrique, c’est-à-dire parmi la population, Gilles Caron devient témoin des brutalités infligées aux civils. Il décide de montrer cette situation à travers ses photos.
Gilles Caron part alors au cœur des grands conflits entre 1965 et 1970. Il était là pendant la guerre des Six Jours, la guerre du Vietnam, la guerre au Biafra, la guerre en Irlande du Nord. Il était présent aussi à Paris durant mai 68 et pendant la répression du Printemps de Prague. En cinq années Gilles Caron a au total réalisé plus de cinq cents reportages. Il finira par y laisser la vie lors d’un reportage au Cambodge.
Le conflit intérieur
L’exposition est composée de 6 temps :
- Héroïsme / La conscience de l’événement
- Regard intérieur / L’homme aux prises avec l’Histoire
- Douleurs des Autres / Figures et icônes compassionnelles
- Révolte / Manifs et guérillas : l’icône du lanceur
- Nouvelle Vague / Passion de la jeunesse sixties
- La dernière image / Le reporter comme objet du reportage
Gilles Caron était principalement photographe-reporter de guerre, ce n’était pas un adepte de « photo choc ». Il réalise beaucoup de portraits et montre ainsi la fragilité des civils et des soldats. Lors de ses reportages pendant la guerre du Biafra et au Tchad, Gilles Caron tourne son objectif vers ses confrères journalistes. Il a une véritable interrogation sur son rôle de « témoin ».
À côté de ses reportages de guerre, Gilles Caron immortalise les mouvements de révoltes, que ce soit en Irlande du Nord, à Prague ou lors de mai 68 en France. Il se focalise sur les gestes. Les lanceurs plus précisément.
Le photographe a aussi passé un peu de temps sur les plateaux de cinéma de Godard et de Truffaut. Il photographie la jeunesse, autant les étudiants que les stars des sixties.
Je vous conseille de regarder le documentaire (si vous êtes intéressé c’est celui-ci), il est complet et permet de comprendre son métier et ses intentions.
Verdict
Une belle exposition malgré quelques images difficiles. Elle nous pousse à nous interroger sur le métier de journaliste, notamment celui de reporter de guerre. Beaucoup d’émotions et de compassion se font sentir dans tous les clichés.
J’ai vu cette exposition avant les attentats, et je retournerai la voir parce qu’aujourd’hui je sais que je lui porterai un autre regard.
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Gratuit
du 9 octobre 2015 au 9 janvier 2016
Hôtel de Fontfreyde Centre Photographique
34, rue des Gras
63000 Clermont-Ferrand
Ouvert :
du mardi au samedi de 14h à 19h
2 Comments
Claude BENOIT à la GUILLAUME
17 décembre 2015 at 7 h 10 minMerci pour ce très bon et fidèle article. J’ai couru voir cette expo. G.Caron est celui qui m’a fait approcher et aimer la photo. J’étais un gamin alors. Sacré bonhomme!
cdt.
Sauvazine
18 décembre 2015 at 10 h 09 minMerci à vous pour votre message ! bonne journée